Le sujet, derrière les critiques, c’est celui de la liberté d’expression du salarié.
La liberté d’expression, de façon générale, est une liberté fondamentale reconnue par des textes majeurs, comme la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ou encore la Convention européenne des droits de l’Homme.
L’exercice de la liberté d’expression dans l’entreprise
En principe, le salarié doit pouvoir exercer sa liberté d’expression dans l’entreprise et en dehors de celle-ci.
Ce principe est toutefois limité à la condition que l’exercice de cette liberté ne dégénère pas en abus.
Quand des critiques deviennent-elles abusives ?
Il y a abus dans l’exercice de la liberté d’expression si elles consistent dans des propos injurieux ou diffamatoires.
Quid de propos excessifs ?
- Pour la Cour de cassation, ils peuvent constituer un abus (Cass. Soc. 30/09/2020, n°19-10.123).
- La Cour européenne des droits de l’homme, en revanche, semble considérer qu’ils peuvent être admis s’ils ne sont pas insultants (CEDH 20/02/2024, n°48340/20).
Comment caractériser les critiques abusives ?
Pour déceler des critiques abusives, il faut les mettre en perspective, via une appréciation subtile basée sur :
- l’examen approfondi de la teneur des propos ;
- l’analyse du contexte dans lequel ils s’inscrivaient ;
- l’étude de leur impact potentiel.
Applications : critiques abusives
Exemple n°1 :
Fait pour un salarié d’exprimer publiquement, de manière véhémente et agressive, certaines revendications et de mettre en cause la probité de sa hiérarchie (Cass. Soc. 16/10/2013, n°12-11.971).
Exemple n°2 :
Propos dénigrants et diffamatoires, tenus en dehors du temps et du lieu du travail, adressés à un autre salarié afin de donner une mauvaise image de ses dirigeants et créer un malaise entre ces derniers et les membres du personnel (Cass. Soc. 15/06/2022, n°21-10.572).
Applications : absence d’abus
Exemple n°1 :
Fait , dans le cadre d’une réflexion sur la stratégie du Groupe, d’exprimer ses divergences avec la Direction dans des termes qui ne sont ni injurieux, ni diffamatoires, ni excessifs, et n’ayant pas vocation à être diffusés publiquement (Cass. Soc. 15/05/2019, n°17-20.615).
Exemple n°2 :
Comportement critique du salarié, et refus d’accepter la politique de l’entreprise reposant sur le partage de la valeur “fun & pro”, ainsi que sur l’incitation à commettre des excès (alcoolisation excessive) et dérapages (Cass. Soc. 09/11/2022, n°21-15.208).
Peut-on être sanctionné pour avoir critiqué son employeur ?
Si les critiques sont abusives, un(e) salarié(e) peut faire l’objet d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave.
Si les critiques ne sont pas abusives, aucune sanction ne peut être prise à l’encontre de l’employé(e) concerné(e).
A noter : Le principe du motif contaminant
Un licenciement fondé, même partiellement, sur l’exercice légitime de la liberté d’expression entraîne la nullité du licenciement.
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