Maître RAYNAUD Pauline

L’insuffisance professionnelle

Qu’est ce que l’insuffisance professionnelle ?

L’insuffisance professionnelle, qui peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, désigne l’incapacité d’un(e) salarié(e) à exécuter les missions qui lui sont confiées de manière satisfaisante.

 

Comment caractériser l’insuffisance professionnelle ?

La mauvaise exécution des tâches attribuées doit :

  • reposer sur des éléments objectifs, précis et vérifiables ;
  • être durable et tenir compte de l’ensemble de l’activité du salarié ;
  • se révéler imputable au salarié de façon personnelle.

 

L’insuffisance professionnelle sera donc difficile à matérialiser :

  • face à une défaillance passagère ;
  • dans un contexte d’organisation défectueuse (manque de personnel, de moyens matériels pour mener à bien l’activité, augmentation du volume de travail sans soutien, etc.) ;
  • en cas de non-respect par l’employeur de ses obligations en matière d’adaptation des salariés à leur poste de travail et au maintien de leur employabilité (au vu, notamment, de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations).

 

Applications

L’insuffisance « qualitative » est caractérisée dans les cas suivants :

  • défaillances professionnelles d’un directeur national des ventes à l’origine de la baisse du chiffre d’affaires de l’entreprise, alors que l’intéressé avait participé à des réunions de formation organisées depuis plus de 8 ans (Cass. Soc. 23/01/2019, n°17-21.966) ;
  • salarié qui n’arrivait pas à mener ses missions malgré un plan de retour à la performance fixant des objectifs concertés, et qui faisait preuve d’un manque total d’autonomie malgré des efforts de formation et d’adaptation de l’employeur (Cass. Soc. 16/05/2018, n°16-25.552).

 

En revanche, l’insuffisance « qualitative » ne sera pas caractérisée dans les cas suivants :

  • insuffisance professionnelle reprochée à un salarié démontrant exercer ses fonctions avec sérieux dans un contexte de surcharge de travail récurrente et de sous-effectif persistant (CA Paris, 13/10/2011, n°08/08488) ;
  • insuffisante qualité de travail reprochée à un salarié qui manque de spécialisation pour les tâches qui lui sont confiées et dont le chef d’équipe est absent (Cass. Soc. 24/01/1995, n°93-42.809).

 

Il est également possible de se confronter à un cas d’insuffisance « quantitative ».

L’insuffisance de résultat peut constituer une cause de licenciement si elle résulte d’une insuffisance professionnelle ou d’une carence fautive.

Pour qu’il en aille ainsi, il faut pouvoir démontrer qu’elle repose sur des éléments quantifiables.

De plus, lorsqu’il existe des objectifs, il faut être capable d’établir :

  • qu’ils ont été préalablement fixés ;
  • qu’ils étaient réalistes et raisonnables.

 

Le caractère non fautif de l’insuffisance professionnelle

Le principe

L’insuffisance professionnelle ne constitue pas une faute, dès lors qu’elle est involontaire.

Elle ne peut donc pas faire l’objet d’une sanction disciplinaire (telle qu’un licenciement pour faute). 

L’exception

Si l’exécution défaillante du travail réside dans l’abstention fautive d’un salarié ou encore sa mauvaise foi délibérée, elle s’apparente alors à une faute, et entre à nouveau dans le champ disciplinaire.

 

Je suis salarié(e) : comment me prémunir face à des difficultés professionnelles ?

Quelques pistes :

  • solliciter, par écrit, le bénéfice de formations permettant de les dépasser ;
  • signaler officiellement les perturbations extérieures à votre compétence (manque de moyens humains et/ou matériels, problèmes de santé, etc.) ;
  • s’assurer que les objectifs assignés sont réalistes et en adéquation avec l’état du marché et, a contrario, le faire remonter.

 

Je suis employeur : comment réagir face aux difficultés professionnelles de mes salarié(e)s ?

Quelques pistes :

  • vérifier que la situation n’est pas liée à des défaillances internes (mauvaise organisation, surcharge structurelle de travail, absence de fixation d’objectifs, objectifs irréalisables, etc.) ;
  • former régulièrement vos salarié(e)s, pour assurer le maintien de leur niveau d’employabilité et leur capacité à occuper leur emploi ;
  • déployer et documenter des plans d’amélioration concrets et cohérents.

 

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Maître Pauline Raynaud

Maître Pauline Raynaud

Avocate au Barreau de Toulouse depuis 2018, je consacre exclusivement mon activité au droit du travail, dans toutes ses dimensions.

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